Perrine Le Querrec

La Construction
citations

JOUR [illisible]
On parlera de la Construction comme d’un corps humain, comme d’une humanité. On demandera de ses nouvelles, Comment va-t-elle ? Comment va son cœur, son foie, ses mains, ses jambes, son dos, son âme ? La Construction est un organisme vivant. Alimentation, évacuation, mouvement, respiration, circulation. Corps manipulable modulable mon corps minable. Perfectionnable. Ensemble simple et complexe. La Construction va bien. La Construction vous salue. Elle vous convie à un souper, à un bal masqué à une visite à un concert à une récolte à vous coucher à vous endormir à guérir.

JOUR AVEC
Mes outils, le coude le doigt le pouce le pied la foulée.
Je coupe la maison en 2. En deux je la divise. Gauche droite. Multiplie les points cardinaux.
N-S-E-O.
NN-SS-EE-OO.
Ainsi pourrons-nous aller Sud Sud revenir revenir Nord changer Est Est direction Ouest Ouest choisir se perdre choisir se perdre. Division du mal la moitié au Nord l’autre à l’Est de quel Est parles-tu de quel Nord pars-tu de quel point regardes-tu vers quel Sud quel mal ?
Si l’homme est coupé en deux comme la maison coupée en deux, où peut-il habiter coupé en deux comme une maison inhabitable précipice où tomber l’homme tombé dans la grande coupure la déchirure le scindé en deux homme et maison, n’espérez pas poser un lit une chaise une table pour l’homme fendu n’espère pas même un seul pas entre une moitié et l’autre le danger de mort réelle par-dessus le franchissement de la masse inerte massive tandis que l’homme mortel coupé en deux de la peau de la chair un squelette trois fois rien périssable.
Ablater
Pénétrer la surface.incision jusqu’à la métamorphose.s’occuper des deux moitiés.division.concentrer son attente sur la brèche.
On respecte les limites d’une façon effrayante.
La surface est une limite.
Perforer
outrepasser

AUJOURD’HUI je m’exerce
Il nous faudra partir tourner par la terre jusqu’à trouver l’arpent de l’accueil.
Je mènerai mes hôtes, les emmènerai nous marcherons nos pas dessineront la route puis s’arrêter. Je connais la route comme si je l’avais construite moi-même.
Nous dormirons dès fatigués parlerons debout comme couchés et chaque parole nous rapprochera. De cette marche naîtra notre force, guidés par le désir de la Construction nous dirigerons sans hésiter notre corps vers son refuge.
Je sais qu’il apparaîtra.
Cet arpent ce lopin ce terrain vague. Que sur cette vague nous nous laisserons porter. Que ce sera ici. Que les possibles les bâtir les habiter se sont noués et dressés précisément là dans l’attente de notre projet et de nos mains.
Je m’exerce à la solitude du premier pas. Le plus grand courage d’un corps.